Jubilé de la Vie Consacrée : Sortir pour engendrer l’avenir
Article du P. Mario Zanotti – Secrétaire Général de l'USG
Extrait de l'Agence de presse SIR
Le Jubilé interpelle profondément la vie consacrée, appelée aujourd'hui à ne pas se replier derrière ses propres murs, mais à devenir une présence vivante dans le monde.
En un temps marqué par les injustices, la solitude et les fractures, les religieux et religieuses sont appelés à faire naître le dialogue, l'espérance et la fraternité — signes prophétiques d'un Évangile qui s'incarne.
Que représente le Jubilé pour un religieux ou une religieuse ?
C'est un temps pour relire sa vie, discerner les signes de la présence de Dieu, redécouvrir la joie de l'appel reçu, et raviver le désir d'une vie toujours plus humaine, pleinement accomplie dans le don de soi par amour du monde.
« Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle » (Jn 3,16).
C'est pourquoi les consacrés se sentent pleinement impliqués dans la construction d'un monde où règnent la paix et non la violence, un monde dans lequel chacun peut trouver sa place dans l'écosystème auquel nous appartenons tous et qui nous relie dans un destin commun.
Dans un monde où de puissants intérêts économiques écrasent la vie de peuples entiers, provoquent des injustices indicibles, détruisent les ressources naturelles et sèment la mort, nous nous sentons appelés à être des artisans de nouvelles relations — de pardon, d'inclusion, d'accueil, de justice et de paix entre les peuples. Nous ne pouvons plus rester enfermés dans nos structures comme dans des citadelles ou des forteresses, pour préserver une vie prétendument intacte mais sourde au cri qui monte de la terre vers le ciel. Tel était d'ailleurs le sens profond du Jubilé célébré tous les cinquante ans en Israël : permettre à la terre cultivée de se reposer pour retrouver sa fertilité naturelle, promouvoir l'harmonie sociale et la justice par la restitution des terres à leurs propriétaires d'origine, la libération des esclaves, et la guérison des malades par le pardon des péchés accordé par Dieu.
Jésus, dans la synagogue de Nazareth (cf. Lc 4,18–19), omet le verset du prophète Isaïe qui parle de la vengeance de Dieu, et se proclame lui-même comme celui par qui s'accomplit l'année de grâce du Seigneur (cf. Is 61,1–3).
Mais aujourd'hui, en cette année 2025, qu'est-ce qui peut empêcher que s'accomplisse non pas l'année de grâce, mais le jour de la vengeance ? Qu'est-ce qui empêchera l'humanité, aveuglée par l'égoïsme et les divisions, de se détruire elle-même ? Maintenant que le Christ est monté vers le Père et nous a donné l'Esprit Saint, c'est à nous — croyants en Lui — qu'il revient d'être sa présence vivante dans le monde.
Les religieux et les religieuses se sentent en première ligne dans ce « bon combat ». Il s'agit de se sentir responsables de notre aujourd'hui et de l'avenir de tous. Il s'agit de rechercher le dialogue entre les peuples, les cultures et les religions. Et qui mieux que les communautés religieuses peut être laboratoire vivant d'intégration entre les différences, famille multiculturelle et signe prophétique face à ceux qui sèment la haine envers ceux qui viennent d'ailleurs, parlent une autre langue ou croient en un autre Dieu ?
Le dialogue interreligieux est l'une des urgences majeures auxquelles la vie consacrée est aussi appelée. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons vraiment nous sentir une seule famille, partageant la même vie humaine que nous recevons chaque jour du même Père de tous les frères — pour reprendre les mots de l'encyclique du pape François.
La vie religieuse est un don reçu du Christ lui-même — non pas un privilège, mais un appel à un service plus aimant, capable de transformer et de convertir les cœurs non pas par des paroles, mais par l'exemple d'une vie fraternelle, de prière, de travail, de partage, de respect, de pardon et d'amour.
Nous ne pouvons plus rester cachés derrière les murs de nos couvents ou dans notre autosuffisance, car le monde a besoin de la lumière de la foi et de l'espérance que seul le Christ peut offrir. Nous, religieux et religieuses, essayons chaque jour d'ouvrir notre cœur à la Parole de Dieu et notre vie à son Esprit Saint, afin qu'il vienne et s'incarne chaque jour dans nos actions.
Alors, vraiment, le monde verra la lumière du salut et la terre redeviendra féconde de vie.